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Les jardins de Calude
13 août 2014

Hôtel (très) particulier (VIII)

VIII

 

 

-          Juliette, ma chérie, mais où étais-tu ? Nous t’avons cherchée partout, nous étions tellement inquiets ton père et  moi

-          J’étais juste un peu plus en avant, maman, je n’y peux rien si vous êtes vieux et fatigués et que vous traînez au lieu d’avancer normalement

-          Vieux et fatigués, il faut être venus ici pour entendre des choses pareilles, mais je rêve !

-          Non, tu ne rêves pas,  c’est juste la vérité, dit Juliette

-          Et impertinente, avec ça ! Jacques, tu entends ça, notre fille nous traite de croulants

-          Elle n’a pas tout à fait tort, chérie, j’avoue avoir un peu lambiné sur la fin

-          Lambiné ? Tu veux dire dormi, ronflé, pioncé, roupillé, dit Juliette en s’asseyant à notre table. Mais qu’est-ce qu’on vous a servi, ça a l’air    dégoûtant, vos trucs !

-          Du cresson à la vase et des cuisses de crapaud, répondit Jacques

-          Mais toi, Juliette, tu n’as rien mangé, tu dois être affamée, questionnais-je

-          T’en fais pas maman, j’ai très bien mangé, merci

-          Tu as déjeuné ?

-          - Bien sûr !

-          Et tu as pu avaler ces immondices, je ne te reconnais plus, ma fifille, si difficile, si pointilleuse d’ordinaire sur la nourriture…

-          T’en fais pas, j’ai pris le menu enfant, c’était parfait

-          Peux-t-on savoir ce qu’ils t’ont servi ?

-          Une quiche au fromage, un steak haché, un méga cornet de frites, une glace deux boules à la fraise et un chou à la crème…Ah, j’oubliais, un maxi coca.

-          C’est pas possible, Jacques, tu entends ça ? Mais tu n’as pas déjeuné à la Taverne Joyeuse ?

-          Mais si, j’ai donné le code secret, et je suis rentrée, au fait, je suppose que vous l’avez deviné enfin, puisque vous êtes ici ?

-          C’est ta mère qui l’a trouvé, dit Jacques, ta mère est incollable sur les énigmes

-          Incollable peut-être, mais pas super super rapide, ricana Juliette

-          Juliette, un peu de respect, s’il te plaît, je trouve que tu as pris beaucoup d’assurance depuis que nous t’avons perdue

-          Ben, il fallait bien, si j’avais dû compter sur vous pour me guider, on serait encore en train de chercher notre route

-          C’est bien vrai, ça, dit Jacques, MA fille est épatante

-          TA fille, qui est aussi MA fille devrait mesurer ses propos et nous parler sur un autre ton…

-          Le principal, c’est qu’on l’ait retrouvée, n’est-ce pas Juliette ? Viens, ma fifille, viens sur les genoux de ton vieux papa chéri…

-          Mais c’est qu’il en rajoute une couche, l’animal, on est vieux à 42 ans, maintenant, ça, c’est un comble !

 

Juliette, trop contente du soutien de son père et ravie de faire tourner la situation à  son avantage se précipita sur les genoux de son père, qui n’attendait que ça pour en faire sa complice et pour l’accueillir dans ses bras tout en me jetant de furtifs regards en coin. Je n’étais pas dupe de leur petit jeu, mais je fis mine de les ignorer en m’absorbant dans une méditation profonde qui dura un certain temps.

 

-          Ce n’est  pas tout, dit brusquement Jacques, maintenant que nous sommes ici, tu as peut-être une idée du chemin à suivre pour sortir de ce labyrinthe, Juliette

-          Pas vraiment, mais la taverne ne doit pas être bien loin de la sortie, autrement, ça n’aurait aucun sens, fis-je remarquer 

-          Oui, mais encore faut-il emprunter le bon chemin, et vous connaissant, on n’est pas encore sortis de l’auberge !

-          De la taverne ! Rectifia Jacques pour détendre l’atmosphère

-          Taverne, auberge, c’est kif kif bourricot, ajoutais-je un peu excédée

-          Te fâche pas, m’amour, dit Jacques en récupérant le sac de plage

-          M’amour, attends, on n’est plus à l’âge de pierre, appelle moi Nicole, ça suffira largement !

-          Nicole, ne sois pas aussi nerveuse, ce sont les cuisses de crapaud qui ne passent pas ou quoi ?

-          Non, c’est la bave, j’ai horreur de la bave de crapaud

-          Pourtant, on l’emploie parfois dans certains remèdes !

-          Lesquels ? S’enquit Juliette

-          Elle élimine les rides, ralentit le vieillissement, facilite la cicatrisation…

-          Non, ça c’est la bave d’escargot, rectifiai-je

-          Ah oui, tu as raison, non, on emploie la bave de crapaud dans certaines préparations dont l’effet est semblable aux antibiotiques, tu vois, les crapauds sont utiles

-          La bave de crapaud, c’est surtout des remèdes de sorcières, conclut Juliette

-          Bon, dis-je, on part de quel côté, à présent, il faudrait peut-être se décider si on veut voir le lac un jour ?

-          Je pencherais pour la droite, dit Juliette

-          On te suit, dit Jacques

Nous quittâmes la table sans dire au revoir à personne, car la salle était vide et un silence de mort s’installa dès notre départ. Malgré la médiocrité du repas, nous avions repris des forces car nous nous étions reposés un grand moment. Les retrouvailles avec Juliette nous avaient fait le plus grand bien et nous sentions que l’issue n’allait plus tarder à présent.

A moins que…

 

(à suivre)

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