CA NE MANGE PAS DE PAIN...
Un nouveau petit vaudeville
Personnages : LOUIS (le boulanger) COLETTE (la boulangère) Madame PICHU (la cliente)
- COLETTE. Voilà des baguettes bien chaudes, Madame Pichu, ah, elles sont belles et dorées à souhait ce matin
- LOUIS Oui, j’avoue avoir bien réussi cette fournée madame Pichu, c’est un tour de main qu’on ne peut pas prendre en une semaine
- COLETTE. voilà la récompense de bien des années d’efforts, mon mari est courageux
- Mme PICHU Ah ça oui, ce n’est pas un cossard, votre mari, madame Lamy
- COLETTE. Pour ça non, se lever tous les matins à 5 heures, c’est pas tout le monde qui pourrait en faire autant !
- Mme PICHU Voyez ce lézard d’épicier du coin, c’est la Marie qu’est obligée d’ouvrir la boutique, c’est-y pas malheureux ?
- C’est un feignant et en plus il découche avec la Fernande, la fille du bistrot du Jean.
- LOUIS C’est vrai ce que vous dites, madame Pichu ou c’est des racontars de bonnes femmes ?
- Mme PICHU Non, Louis, ce ne sont pas des menteries, mais la vérité vraie, que j’vous dis…
- LOUIS Mon Dieu, y a plus de morale sur terrre, ma pauvre Madame Pichu !
(il sort)
- COLETTE. Tu crois qu’elle est au courant ?
- Mme PICHU Qui ça ?
- COLETTE. Ben, la Marie
- Mme PICHU J’crois pas, de toute manière, avec sa boutique, elle n’a pas le temps de penser à autre chose
- COLETTE. Oui, et avec tous les clients qui défilent, elle n’a guère le loisir d’avoir des états d’âme, tant mieux pour elle, la pauv’ femme !
- Mme PICHU Et vous, Colette , avec Gérard…
- COLETTE. Bof, c’est terminé, trop compliqué à s’organiser, fallait qu’il se pointe à 5h15 à l’étage et reparte déjà à 7, ça nous donnait pas assez de temps pour faire nos petites affaires…et j’étais éreintée pour servir le client à 7h30
- Mme PICHU Il l’a jamais su, le Louis ?
- COLETTE. Jamais, tu penses bien, autrement, quelle affaire, je n’ose même pas y penser !
[Le boulanger revient par surprise]
- LOUIS Quelle affaire ?
- Madame PICHU Oui, on parlait de l’épicier et de Fernande
- LOUIS Heureusement que j’ai une petite femme bien gentille et bien vaillante, et fidèle par-dessus le marché, pour ça je ne crains rien, n’est-ce pas bibiche ?
- COLETTE (rosissant légèrement) Bien sûr, mon zouzou, on est soudés comme les dix doigts de la main, nous deux…
- Madame PICHU C’est beau, un couple qui s’aime comme vous depuis si longtemps !
- LOUIS 30 ans de mariage cette année, vous vous rendez compte, madame Pichu ?
- Mme PICHU Oh oui, Louis, et je vous envie, vous et Colette…
- LOUIS Oh, mais c’est qu’on s’en donne les moyens, n’est-ce pas Chouquette ?
- COLETTE Tu as raison, mon zouzou, ah, on m’appelle au téléphone, excusez-moi deux minutes
[Elle part dans l’arrière - boutique]
- LOUIS J’ai fait comme si je ne savais rien
- Madame PICHU Comme si vous ne saviez pas quoi ?
- LOUIS Pour Colette…
- Madame PICHU Je ne comprends pas…
- LOUIS Ben oui, pour Colette j’ai su, elle et le facteur…Allez, ne faites pas l’ignorante, je sais que tout le quartier est au courant…
- Madame PICHU Ah bon, je croyais être la seule dans la confidence, ah, on ne peut pas faire confiance à personne, pas même à sa meilleure amie, c’est-y- pas désolant, ça ?
- LOUIS Oui, je pense que c’est exactement ce que doit penser Colette à votre égard, Madame Pichu !
- Madame PICHU Oh Louis, je ne vous permets pas…
- LOUIS Et bien je me passe de votre permission, allez, rentrez chez vous, madame Pichu, et à l’avenir essayez d’être moins bavarde, ça ne coûte pas grand-chose de fermer sa bouche et surtout …ça ne mange pas de pain, hi hi hi …
RIDEAU
©mai 2015