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Les jardins de Calude
20 septembre 2012

Quand passent les cigognes

cigogne

 

Quand IL est arrivé, je suis sortie de ma maison, comme me l’avait demandé Michel. J’ai retiré mon tablier blanc, ouf, il était temps, j’étais fourbue, et je n’aime guère qu’on me voie dans cet accoutrement, et que les gens s’imaginent que je lui sers juste de bonniche… J’ai revêtu mes plus beaux atours pour lui plaire. « Dépêche-toi, dépêche –toi, a répété Michel, ne perds pas de temps ! » Puis il a pris la cisaille et il est alors parti couper les branches des arbres. Depuis le temps que je lui répète que ce n’est pas l’époque pour tailler les arbres, il n’y a rien à faire, il s’obstine, et crac, quelques semaines après, les cerisiers oublient de faire des fleurs et quand vient l'automne de produire des fruits. Sacré Michel, il n’a jamais su tailler, ni jardiner non plus d’ailleurs, il est juste bon à faire des chansonnettes avec sa troupe qu’il faut nourrir et entretenir, tu parles d’une galère, avec ça qu’il ne gagne pas un rond, c’est moi qui suis obligée de lui acheter ses costumes de scène et de faire la popote pour tout le monde,  c’est un comble !  Michel est un poète, quand il élague, il a toujours un air au coin des lèvres : « l’hirondelle et la fauvette… ont déjà fait leur nid…oui ! » Moi, je le laisse faire, après tout, si ça fait son bonheur, y a déjà assez d’emmerd… sur la terre pour ne pas en rajouter. Puis, d’un geste auguste et sûr ( hum hum),  il sème pour les récoltes futures, du blé, de l’avoine, que sais-je encore, je n’ai jamais vraiment fait la différence entre toutes ces graminées… et lui non plus, je pense, mais les poètes, c’est bien connu, mangent d’un autre pain, même s’il chante à qui veut l’entendre qu'ilf aut gagner son pain blanc . je pense qu’il n’a jamais su distinguer un pain blanc d’un pain de seigle ! Michel passe, aux yeux de bien des gens pour un allumé, il dérange par ses excès d’optimiste, son ami Jacques lui a même dit qu’il n’y a que les fous qui croient au bonheur et à l’éternel beau temps. « Allons-y pour la folie» a répondu Michel en riant aux éclats, et Dieu me garde bien  d’en guérir ! Puis il a cueilli pour moi un joli bouquet de lilas et est rentré se changer pour revêtir son costume de scène et enfiler ses célèbres bottes et sa cape, qui commencent à faire sa gloire et sans lesquelles il ne serait rien. Il est beau mon Michel, habillé ainsi, avec ses longs cheveux de jade qui tombent en boucle sur ses épaules et ses longues jambes si fines et si bien galbées dans ses collants noirs ! Ce soir, quand il rentrera, heureux et harassé de son spectacle, je sens qu’il va se jeter sur moi, comme d’habitude, mais surtout en ce début d’avril où le temps, redevenu doux et propice à bien des folies, il me redemandera ce que je lui refuse depuis si longtemps, parce que j’estime que le temps n’est pas encore venu ni pour lui, ni pour moi. Il me chantera comme il le fait habituellement : « dépêche-toi, dépêche-toi, ne perds pas de temps, donne ta vie et donne ton sang pour faire un enfant… » Mais je ferai la sourde oreille, et pour le charrier un peu, je lui dirai que malheureusement, il lui faudra patienter encore quelques temps, et attendre, comme en Alsace ou ailleurs,  le prochain passage des cigognes…

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